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Yvenou Critiquer - ( aka Yvenou sur Youtube )
13 octobre 2019

Critique Andy #22 : Midsommar,le cauchemar lumineux de Ari Aster

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Bonjour et bienvenue à tous sur cette critique qui va être pour moi la plus difficile, puiqu’elle va concerner un film que j’attendais énormément depuis l’arrivée du premier teaser, le deuxième film du génial Ari Aster qui avait prouvé avec hérédité qu’il maitrisait sa réalisation et les codes horrifiques, tout en apportant des thèmes fort au sein d’une œuvre perturbante et malaisante, aujourd’hui on va parler de Midsommar.

Tout d’abord avant de faire le résumé je vais brièvement expliquer ce que j’attendais du film, je suis quelqu’un qui aime énormément les beaux plans dans un film, l’agencement des décors, la symétrie, la photographie en générales (les lumières etc…). Je ne considère pas que cela fait tout mais le premier teaser allait déjà dans ce sens et vu la maitrise d’Aster sur Hérédité on l’imaginait mal faire moins bien, de plus le film nous promettait une esthétique peu vue dans l’horreur, du jour et de la bonne lumière de partout, d’une lueur éclatante et rayonnante. Je bavais donc sur les bandes annonces en y attendant un véritable trip esthétique et horrifique. Avant de donner mon avis passons au résumé.

Dani Ardor est une jeune étudiante américaine en psychologie, un évènement tragique qu’elle va vivre va faire que son petit ami Christian et son groupe d’ami, qui contient Josh, Mark et notamment Pelle, un étudiant suédois aux Etats-Unis qui leur a proposé ce voyage afin de leur faire découvrir le petit village reculé de la Suède où il a vécu, Halsingland. Ils s’y rendent et découvre une communauté étrange avec des rites, traditions et coutume totalement différentes du monde « civilisé » extérieur.

Avant de donner mon avis il est important de préciser que la critique spoilera, étant donné que pour moi les retournements du film n’en sont pas vraiment, les bandes annonces ne cherchant même pas à les dissimuler, surprendre n’est absolument pas le but du film.

Lorsque j’écris ces mots, j’ai vu le film 6 fois, à chaque fois fasciné par ce que je regardais, Midsommar est l’une des plus grosses anomalies filmiques que j’ai pu voir, il est dur de dire si le film est bon ou mauvais objectivement (photographie incroyable de Pawel Pogorzelski, la réalisation sèche, méthodique et presque maniaque de Aster, musiques très belles) sur les dimensions techniques le film est évidemment une pure réussite, Ari Aster a créé une œuvre unique, un véritable monde à petite échelle, avec ses propres codes, normes ou valeurs, que ça soit dans le décor, dans les jeux d’acteurs ou dans sa réalisation toujours aussi propre, et pourtant dérangeant. Mais il est pour moi important de préciser certaines choses.

D’abord il s’agit d’un film très personnel pour Ari Aster, l’ayant écouté dans plusieurs interview, Aster sortait d’une relation amoureuse lorsqu’il a décidé d’écrire ce film, une manière pour lui d’éviter de se recroqueviller sur lui-même, lorsque l’on sait cela, on peut en déduire que Ari Aster s’identifie à l’un des personnages, Christian. Ce n’est qu’une hypothèse mais pour moi c’est comme si Ari Aster cherchait à s’auto-punir de cette fin de relation, le personnage de Christian ne trouvant pas le courage de quitter Dani durant tout le film. Mais ce n’est pas tout, au niveau amoureux, un autre personnage du film est important, Ingemar.

En effet on apprend lors d’une discussion à leur arrivée dans le village que Ingemar se voyait en couple avec Connie, il considérait avoir un rendez vous avec elle, mais elle ne le voyait pas comme ça, Connie s’étant mis en couple avec Simon on peut considérer que Ingemar à décider qu’ils feraient tout les deux de bons sacrifices par pure vengeance, ce qui expliquerait pourquoi Ingemar s’est dévoué à être un sacrifice à la fin, le remord d’avoir contribué à tué la femme qu’il aimait.

Ce qui nous amène à une autre vision que l’on peut avoir du film, son message extrêmement féministe. Dans la communauté de Harga, les hommes se font très discret, on y voit d’ailleurs une sorte de leadership dans le personnage de Siv. De plus la présence d’un homme nu dans le film, ou l’évocation du pénis se fait lors de scènes de tension, voire de meurtre (comme le meurtre de Josh, ou la fuite de Christian, ou encore Mark urinant sur la l’arbre des ancêtres avec la phrase « put your disgusting dick away » ou « éloigne cette bite immonde loin d’ici » dite en suédoise), la vue ou l’évocation de vagin( ou du pubis de la femme souvent ) se fait lors de scènes d’amour, ou de scènes posées (par exemple l’histoire d’amour de la broderie, la discussion entre Siv et Christian à propos du poil pubien de Maja ou tout simplement la scène de sexe du film ou l’on voit des corps nues de femmes de différents âges). On peut aussi parler des peintures murales évoquant surement des scènes de rituelles de la communauté, sur l’une d’entre elle dans le dortoir, on peut voir deux personnages dansant nue, leurs pénis orientés vers un feu se trouvant entre ces deux derniers.

Ce qui m’amène à un deuxième point important du film, les décors, tout dans le film raconte quelque chose, et c’est sans aucun doute pour ça que le film est aussi fascinant, notamment à revoir, par exemple, le premier plan du film (visible en dessous) en est un résumé, on ne le comprend évidemment pas forcement au premier visionnage mais en la revoyant, on se rend vite compte qu’il retrace les grandes lignes du film. Chaque peintures, dessins ou autres représentations raconte quelque chose, par exemple le motif de l’ours qui revient à plusieurs reprises dans le film, chez Dani avec un tableau, l’ours en cage à Harga, les dessins d’ours en feu dans la maison de Siv et enfin Christian dans la peau de l’ours lors du bucher final. A noter que sur le tableau chez Dani l’ours et la petite fille se font face et son proche, on y voit presque un conte de fée, l’amour entre une petite fille et son ours (Ari Aster défini d’ailleurs son film comme un conte de fée, ce que je pensais de la fin d’Hérédité). On peut aussi évoquer la fameuse broderie que Connie veut voir à leur arrivée, il s’agit de la méthode pour faire tomber amoureux l’homme que l’on aime ( et non le contraire ce qui rajoute en rajoute au propos très féministes ), on voit donc à travers la broderie une clé qui va nous aider à comprendre certaines scène, pourquoi une rune d’amour se trouve sous le lit de Christian et pourquoi il retrouve dans son repas un poil pubien, son verre rempli de jus plus rouge que les autres verres, de plus grâce à cela Ari Aster nous fait comprendre qu’il n’y a pas de tabou autour du corps de la femme dans cette communauté, notamment liée au règles.

 

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Pour changer de point j’aimerai parler des acteurs dans ce films, certes il y a les têtes d’affiche qui sont d’ailleurs très bien Florence Pugh rappelant la performance de Toni Colette dans Hérédité. Mais pour moi, le principal atout de ce film réside dans les acteurs secondaires, lorsque l’on regarde le film, on voit que Ari Aster a fait « fonctionner » cette communauté, chaque personne dans le cadre a une tache et est là pour une bonne raison, elle a quelque chose à faire, un regard à transmettre, un geste particulier, c’est le facteur qui pour moi renforce le malaise et l’inquiétante étrangeté du film.

J’aime aussi énormément le fait qu’Aster joue avec le folklore dans ses films, Attestupa serait une cérémonie géronticide qui aurait existé lors de la préhistoire nordique. Ce qui me permet de passer à un défaut reproché par certaines personnes, la vision Anti-Nordique du film. Il est clair pour moi que le film ne va à aucun moment dans ce sens-là, et même au contraire il va plus dans l’anti américanisme ou anti-capitalisme. A peu de moment la communauté est montrée de façon négative, certes elle commet des atrocités liées à des coutumes presque malsaines, et elle ment pour arriver à ses fins, mais le groupe de Christian ne subit pas un meilleur traitement, ils sont très individualistes, là ou la communauté est très collectiviste, elle semble tout partager même la douleur des autres (a travers les scène de cri, notamment après que Dani voit Christian couché avec Maja, ou durant l’Attestupa avec l’échec du suicide du vieillard, ou à la toute fin lors du bucher des 9 sacrifices), de plus cette communauté est libératrice le personnage de Dani, puisqu’il faut bien interpréter son sourire de fin, pour moi ce n’est pas un sourire liée à sa folie, sa bête noire est parti il s’agissait de Christian et n’ayant plus de parent et de sœur, elle va pouvoir vivre avec cette communauté. Ou alors son sourire implique un glissement vers la folie à la suite des différents évènements, selon certaine interview, Ari Aster et Florence Pugh n’ont pas la même interprétation de cette fin.

Pour en finir avec cette fin j’aimerai rappeler qu’elle est très étonnamment ressemblante à la fin d’Hérédité, on peut les décrire de la même façon et même y voir des points communs en termes de réalisation, la musique des deux étant presque féérique, pourtant dans une scène morbide, finissant par des gros plans d’un personnage, transmettant une émotion particulièrement forte à travers son regard (et son sourire pour le cas de Midsommar). Il s’agit peut-être d’une sorte de marque pour Ari Aster, à voir dans ses prochains long métrages.

Pour conclure cette critique, Midsommar est un film A24, et malheureusement comme les autres, il manque de visibilité, le public qui en a entendu parler est un public qui s’y intéresse particulièrement et c’est extrêmement dommage, c’est une expérience unique et sensorielle, droguée et magnifique ou horrible et révoltante, mais il faut le voir, à préciser que la première version du film, faisait 4H, celle présente dans le Blu-Ray (qui sortira en décembre 2019) fera 3H, et la version en salle 2H30, c’est personnellement mon seul reproche au film, j’aurai aimé en voir plus de cette communauté, on voit par moment que le film a été raccourcit (notamment avec des transitions assez sèches et brusque par moment) surement pour s’adapter au public et ne pas l’ennuyer, et comme dernière chose j’ajouterai que j’attends le prochain film de Ari Aster avec impatience. Cet homme est doué et ses histoires sont brutales, terrifiantes et fascinantes, j’espère qu’il en sera récompensé un jour. Et il ne faut surtout pas hésiter à aller voir ses références, notamment The Wicker Man qui est la plus énorme source d’inspiration pour Midsommar.

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