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Yvenou Critiquer - ( aka Yvenou sur Youtube )
30 octobre 2019

Critique #25 : Joker, la folie au cinéma partie 2

Joker

Bonjour, bonsoir à tous et bienvenue dans une nouvelle critique. Aujourd'hui on va parler de folie, on va parler de clown, on va parler belle réalisation avec des supers acteurs. Aujourd'hui on parle de Joker de Todd Phillips.

 

Avant de faire un léger synopsis du film, je tenais à faire une petite mise en contexte concernant le film. Comme vous le savez, depuis des années les adaptations de personnages de comics Marvel, DC et autres maisons indépendantes ne se comptent plus. Alors avec une décadence certaine de l'univers cinématographique de DC avec la Warner ne sachant plus quelles directives imposer à ces réalisateurs sur la direction à suivre, trois ans après le Joker de Suicide Squad mal-aimé suite à un scénario qui ne l'aidait pas, et un Joker de la série Gotham et sa performance très oubliable l'annonce du Joker de Todd Phillips avait été reçu moyennement.

Avec une bande-annonce qui annonçait un film que peu lié à la mythologie de Batman et en stand-alone par rapport aux derniers films de DC tels que Shazam ou Aquaman , le Joker ce préparait à un accueil mitigé. Cependant depuis maintenant quasiment deux semaines que le film est sorti, il est vraiment mis en avant par le public comme un des meilleurs films de l'année, voire de la décennie (même si la critique est évidemment plus froide). Il est donc temps de comprendre pourquoi le film est encensé et s'il mérite un statut de future œuvre culte (oui).

 

Joker nous narre la vie d'Arthur Fleck, un homme avec de divers troubles mentaux qui souhaite devenir humoriste tout en devant s'occuper de sa mère et qui va en peu de temps basculer pour devenir le Joker. Le synopsis s'arrête car je compte bien évidemment détailler l'intrigue dans la critique et donc cette critique sera évidemment remplie de spoiler,en effet pour pouvoir continuer sur une analyse précise du film je vais devoir dévoiler énormément de point-clés de l'intrigue.

 

Avant de passer à l'aspect interprétation que je me fais de certains aspects récurrents du film, j'aimerais passer quelques lignes sur les qualités techniques du film en commençant par un des points les plus apprécié du film : son acteur principal.

 

Joaquin Phoenix est un acteur à la cinématographie prolifique depuis le début des années 2000 par exemple avec Gladiator, Signs ou The Village et depuis les années 2010 avec Her de Spike Jonze ou les Frères Sisters de Jacques Audiard l'année dernière. Faisant partie de cette catégorie d'acteur qu'on ne cantonne pas à un seul rôle, l'annonce de son arrivée en tant qu'acteur principal dans Joker avait été très apprécié, et sa prestation en tant qu'Arthur Fleck était en effet incroyable. Même sans mentionner l'exploit physique d'une perte de poids incroyable pour le rôle nous donnant un pas de plus dans le malsain de la vie de ce personnage, Phoenix est un très bon Joker. Au-delà du personnage du comics et de séries animées connu de tous il joue très bien la folie d'un homme condamné à la solitude par sa condition sociale et psychiatrique. Ce qui revient évidemment le plus est son rire, ce rire maladif qui semble l’étouffer, qui est perturbant certes mais que je trouve également très attachant. En effet c'est ce rire qui empêche Arthur de pouvoir s'intégrer, c'est à cause de lui qu'il a de nombreux problèmes et je ne peux, personnellement, m'empêcher de ressentir de la compassion pour ce clown et c'est en grand partie grâce au magnifique jeu de Joaquin Phoenix.

 

Ensuite parlons d'un point qui m'a marqué dès les premières bandes-annonces : ce film a une magnifique photographie. Et pour en parler, je vais pouvoir mentionner un autre point positif de ce film, les décors. En effet ceux-ci aident beaucoup à l'immersion dans le film ! Cette représentation de Gotham semblable à un New-York des années 70-80 (période de prédilection des films de Martin Scorsese dont Phillips s'inspire largement, notamment de Taxi Driver et King of comedy (la valse des pantins)), est à la fois sublime et répugnant. D'ailleurs, Gotham est à la base un surnom de New York, un point de plus pour justifier cette ressemblance. Ce Gotham nous offre donc un bon nombre de plans, que ce soit le fameux escalier que l'on voit dans la bande annonce (qui est très vite devenu un même) sur lequel je reviendrais plus tard, le lieu du travail d'Arthur, les rues envahis des poubelles ou encore le plateau télévisuel de Murray. D'ailleurs c'est dans les coulisses de ce plateau que se trouve mon plan préféré du film que vous verrez à la fin de la critique. Cette photographie de Lawrence Sher (directeur de photographie de la plupart des films de Todd Phillips) trouve aussi son importance grâce aux couleurs du films souvent en accord avec ce que ressent Arthur comme par exemple des couleurs chaudes lorsqu'il doit passer sur scène la première en stand-up, ou encore quand il passe sur le plateau de Murray car dans les deux cas il s'agit d'une étape majeure pour lui et également un événement qui le rend heureux (du moins dans son esprit malade).

Enfin je voudrais faire remarquer le travail de Mark Bridges ( reconnu notamment sur son travail sur quasiment tous les films de Paul Thomas Anderson ) qui s'est occupé des costumes et qui je trouve a fait un formidable travail sur le nouveau costume de ce Joker, « osant » si je puis dire laisser tomber le violet si caractéristique du personnage pour un costume rouge-orangé de toute beauté qui je trouve sied parfaitement au Joker de ce film et qui est pour les habitants une lueur d'espoir pour Gotham , et pour Arthur un renouveau puis enfin une forme de lui vraiment heureux. Ces points vont parfaitement avec les couleurs chaudes et chatoyantes de ce nouveau costume.

Également une mention spéciale pour la musique de la compositrice Hildur Guõnadóttir dont la musique nous entraîne dans la misère de Gotham et la folie d'Arthur et dont Joaquin Phoenix a avoué qu'elle avait été d'une grande aide pour entrer dans le rôle (et autant faire une mention pour la musique Rock'n'Roll part 2 de Gary Glitter prise pour la scène des escaliers que j'aime particulièrement).

 

Il est enfin temps de passer à un point important de cette critique c'est à dire une phase semi-interprétative du scénario et de certains plans qui me reste toujours en tête. Bien que le film ait surtout beaucoup de retours positifs certains ne pourraient pas l'aimer, cependant je trouve que même pour ces détracteurs, ce film peut apporter beaucoup.

Déjà j'aimerais relier ce film à sa mythologie d’origine, l'univers de Batman, car même si le film s’en détache, légèrement nombreux sont les clins d’œil fait aux spectateurs avides de références en plus des plus évidentes. Tout d'abord bien que le film se détache de l'origin-story du Joker montré dans le comics The Killing Joke, je trouve qu'il illustre parfaitement un des préceptes du Joker dans ce films : « Il suffit d'une mauvaise journée pour faire basculer un homme dans la folie. » et même si ici, Fleck a bien la maladie depuis le début du film et bien avant et bien que les événements se déroulent sur un peu plus d'une semaine ; cette phrase est parfaitement représentée. Pour moi, c'est bien à partir d'une seule journée que la vie d'Arthur Fleck bascule pour mener doucement vers la vie du Joker et cette journée c'est celle où il se fait virer et finit par assassiner trois coursiers de Wayne Enterprises mais nous y reviendront plus tard. Évidemment le fait que l'histoire se place à Gotham et que l'on retrouve également l'asile d'Arkham nous ramène dans l'univers du Chevalier Noir, il y a une flopée de détails cachés qui ramènent aux incarnations précédentes du Joker mais il est, je trouve, plus intéressant de les chercher soit même.

Cependant j'aimerais revenir sur le fait qu'on apprend au final qu'Arthur en plus d'échouer dans sa quête de trouver son père, que ce soit son père biologique ou même son père symbolique, Murray, (thème très psychologique), il est un enfant adopté qui n'a donc pas de réelle famille. Ce qui était donc un reproche à l'annonce du film, faire une origin-story sur le Joker alors qu'il ne devrait pas en avoir, et en fait sa force car ce film n'est pas une origin-story à proprement parler mais une déconstruction du personnage pour le faire renaître en tant que Joker, et uniquement Joker.

 

Maintenant j'aimerais traiter de la folie d'Arthur dans le film. Je la trouve étonnement bien traitée pour un film qui s'adressait à un aussi grand public, bien loin des clichés sur la folie et les maladies psychopathologiques que l'on voit dans certains films, ici on observe vraiment la personne en tant que sujet plutôt qu'en tant que « fou dangereux », l'image qu'on donne souvent aux psychotiques dans le cinéma. De plus on voit à travers tout le film que celle-ci s'aggrave tel un effet domino tout en enclenchant un effet papillon sur tout Gotham comme si la folie du Joker se reflétait sur la société qui l'entoure, mais j'y reviendrais plus tard, concentrons-nous pour l'instant sur le personnage. Je trouve que son état et l'avancée de sa psychose se joues beaucoup sur un symbole que l'on retrouve souvent dans le film : les escaliers. En effet, je trouve énormément de symbolique dans les escaliers du film, notamment le principal celui qu'Arthur prend le plus souvent et qu'on voit sur l'affiche française du film. Pendant une longue partie du long métrage lorsqu'on voit des escaliers, c'est souvent une montée pour Arthur, une difficulté en plus alors qu'il se sent déjà mal. Mais ils vont aussi montrer l'ascension de la folie d'Arthur et paradoxalement, ce ne sera par une descente. En effet, lorsqu'il se fait virer, on le voit descendre les escaliers de sa boîte et dégrader leur logo en mettant « Don't Smile » tandis que lui va commencer à développer son sourire. On retrouve également cette thématique lors du meurtre des 3 employés, il tue le dernier homme juste devant un escalier, escalier que l'homme ne pouvait plus monter. Évidemment, la scène principale par rapport aux escaliers se situe après son basculement total dans sa psychose après le meurtre dans son appartement lorsqu'il dansait dans les escaliers. Cet escalier qui pendant tout le film est un supplice pour lui est maintenant montré comme rien de plus qu'un accès à l’extérieur, à la nouvelle vie de ce personnage qui n'est ni un Fleck ni un Wayne même plus Arthur mais bien le Joker comme l'a surnommé avec mépris l'homme qui l'avait pris comme modèle. Et même après la scène de l'émeute du métro, il doit remonter les escaliers mais cette fois-ci, de par sa démarche on voit qu'il a le contrôle, tandis que lui avance enfin (que ce soit dans sa folie, dans sa vie ou même étrangement vers le spectateur) , tous les policiers qui sont sur ces trousses semblent l'éviter, ils le contournent et descendent plus profondément dans les entrailles de Gotham.

De plus , j'aime énormément le traitement autour de la folie du film car même le spectateur ne sait plus où il en est , les différentes hallucinations du Joker nous font questionner sur la réalité des faits que nous présente le films : si sa mère a vraiment inventé sa romance comment sont apparus les initiales de Thomas Wayne sur une photo lui appartenant , la dernière scène est-elle une illustration de la folie du Joker avec ce sang sous les chaussures ou bien est-ce une preuve de plus que tout le film n'est que le fruit de son imagination tordue … Tant de questions dont le film ne tient pas à nous donner les réponses.

 

Enfin, avant de passer à la conclusion, je tiens à aborder un point très important du film, le plan social. Pour moi le film expose tout autant la folie de son personnage principal que celle de la société qui l'entoure si ce n'est plus. Le film se construit autour du Joker mais également sur ce qui l'a construit et on voit tout du long que ce sont les vices de la société qui ont entraîné le Joker encore plus profondément dans sa psychose. Dans ce film, Todd Philipps tient à nous montrer ce que peut être l'horreur de la société occidentale, avec ses violences gratuites, sa dureté du travail et l'abandon des personnes qui en ont souvent le plus besoin. Même si le Joker, se dit loin des préoccupations politiques de la ville de Gotham il en est indubitablement le produit. De plus lorsqu'il est au show de Murray son magnifique discours semble bien plus sortir de la bouche du réalisateur plutôt que de celui du psychotique que l'on a suivi pendant le film. Cependant, j'apprécie la révolution finale des habitants les plus lésés de Gotham rappelant notamment l'idée du Joker comme émissaire du chaos et que la folie entraîne la folie comme un cercle vicieux dont le film est l'illustration parfaite.

 

Joker est pour moi un des meilleurs films de l'année comme je l'ai dit mais également un des meilleurs hommages fait à ce personnage si présent dans l'inconscient collectif. Avec une superbe réalisation, un acting formidable, une tripotée d'interprétations possibles et une mise en scène de la folie très réaliste, ce film nous montre qu'il est possible de voir un bon film adapté de comics, voir un grand film adapté de comics tout en gardant une patte de réalisation très marquée (compris Disney ? ). Sur ce, à bientôt pour une nouvelle critique.

Joker-Movie-Set-Photo-Joaquin-Phoenix-Smoke-Break

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Commentaires
S
PLZ NO SPOIL
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B
bjr, très intéressant ...
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Yvenou Critiquer - ( aka Yvenou sur Youtube )
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